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Caroline Allard, une femme déterminée et inspirante

Lactech •

La Ferme Gerluda SENC est établie à Notre-Dame-du-Bon-Conseil depuis 73 ans. À seulement 33 ans, Caroline Allard représente la troisième génération de cette entreprise laitière familiale et en est depuis cette année l’unique propriétaire.

La Ferme Gerluda détient 88,4 kg de quota, compte 67 vaches en lactation dont 3 EX, 16 TB, 34 BP et 9 B avec une moyenne en lait de 11 300 kg à 4,03 % gras et 3,18 % de protéines, et possède une relève d’une quarantaine de têtes. Plus de 111,7 hectares de terre sont en culture et une érablière de 450 entailles détenue avec le conjoint de Caroline est en activité chaque printemps. Le couple dépose d’ailleurs chaque année sa candidature pour acquérir du contingent puisqu’il aurait droit à 1 800 entailles.

C’est en 1980 que Daniel, le père de Caroline, a acheté la ferme de son père. Il détenait à l’époque une trentaine de vaches et 28 kg de quota. Daniel a toujours continué à acheter du quota et à agrandir la ferme. Il a fait l’achat de silos et de terres et a commencé à utiliser l’insémination artificielle.

À la suite du décès accidentel en 1999 de son frère, qui devait succéder à son père, Caroline n’a pas hésité à appuyer ses parents dans l’entreprise familiale. Parmi les quatre frères et sœurs et à seulement 14 ans, c’est elle qui a eu la piqûre pour le métier. Elle se rendait à la ferme matin et soir pendant ses études. Dès ses débuts à la traite des vaches, elle a rapidement progressé; nul besoin d’avoir de longues explications, Caroline apprenait très vite. Constatant que ses nouvelles fonctions étaient loin d’être un fardeau pour elle et animée par la passion, elle a tout naturellement décidé de poursuivre officiellement le travail sur la ferme avec ses parents. Elle se sentait dans son élément, ce qui l’a amenée à prendre de plus en plus de place dans l’entreprise.

Voyant l’engouement de Caroline, son père lui a donné la responsabilité du choix de taureaux, des suivis avec les vétérinaires et de l’entrée des données du troupeau. En 2008, à l’âge de 23 ans, elle obtenait 50 % des parts de l’entreprise et par conséquent a pu bénéficier du prêt de quota de 5 kg/jr du programme d’aide à la relève de la Fédération des producteurs de lait du Québec.

Elle a fini ses études secondaires et s’est inscrite à l’ITA de Saint-Hyacinthe en GEEA, cours qu’elle a terminé en 2005. Lors de sa première année à l’ITA, Caroline a effectué un stage à la Ferme Dessaults de Sainte-Brigitte-des-Saults dans le but d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences. Elle avait aussi le désir d’en connaître davantage sur la machinerie puisqu’elle avait moins l’occasion d’y toucher à la ferme familiale. Étant donné l’ouverture des propriétaires de la ferme, sa demande a été exaucée; elle a travaillé aux champs régulièrement et est rapidement devenue plus à l’aise. L’été suivant, lorsqu’est arrivé le temps d’effectuer les tâches dans le champ de l’entreprise familiale, Caroline était beaucoup plus expérimentée et a eu l’approbation de son père pour y effectuer des tâches. Elle était assurément prête à être plus autonome!

Par ailleurs, les maîtres de stage de Caroline lui ont transmis leur passion pour la génétique et l’ont remerciée en lui donnant deux embryons de leur meilleure vache. Le fait d’observer l’impact de l’amélioration génétique a amené Caroline à s’impliquer à cet égard à son retour dans la ferme familiale. Aujourd’hui encore, c’est elle qui gère cet aspect de l’entreprise en collaboration avec le centre d’insémination.

Le parcours scolaire de Caroline lui a permis de mieux comprendre ses résultats financiers et de prendre de meilleures décisions. Elle a vite réalisé qu’une bonne gestion du troupeau fait toute la différence sur le plan des performances.

UNE JEUNE FEMME IMPLIQUÉE DANS SON MILIEU

Son amour pour les vaches et l’industrie laitière a poussé Caroline à s’impliquer dans la communauté laitière. Elle a la relève à cœur et s’est engagée dans diverses activités dans le but d’amener les jeunes à sortir de leur quotidien et à socialiser en participant à des activités organisées par l’association. Présentement secrétaire et trésorière pour la relève agricole de Drummondville, Caroline a été pendant plus de dix ans dans le Syndicat de la relève agricole du Centre-du-Québec en tant que représentante de l’Association de la relève agricole de Drummond (ARAD) ainsi que présidente de ce groupe. Elle a aussi siégé au syndicat local Drummond-Sud de l’UPA, toujours pour représenter la relève. Depuis sept ans, elle est également publiciste pour La Revue Holstein Québec, représentant le Centre-du-Québec.

Toutes ces expériences ont permis à Caroline de grandir, de développer son sens de l’organisation et de démontrer que même si elle est une femme dans un milieu d’hommes, elle peut atteindre ses objectifs. C’est sans compter tous les gens qu’elle a rencontrés et les relations qu’elle a tissées. En 2018, elle a obtenu le titre d’agricultrice de l’année pour le Centre-du-Québec. Elle n’avait pas besoin de ce titre pour se prouver quoi que ce soit, mais elle le prend comme une tape dans le dos et espère que cela aidera d’autres femmes à prendre leur place dans ce domaine.

En 2004, la ferme a reçu une plaque du CAB Centre-du-Québec pour la meilleure production de gras et protéine du troupeau totalisant 720 kg. Elle a aussi obtenu plusieurs autres prix, dont des plaques en 2006 et 2007 pour la meilleure production de gras et protéine pour la même vache totalisant 1 110 kg et 1 002 kg. L’entreprise a reçu en 2008 une autre plaque pour une vache ayant atteint 925 kg de composantes. Puis, en 2015, soit un an après avoir implanté la robotique, elle s’est vu octroyer un certificat Lait’xcellent AMÉLIORATION pour l’amélioration de la qualité du lait mis en marché pendant l’année. Une de ses vaches a d’ailleurs fait une publicité dans le but de promouvoir le taureau au sein du CIAQ. La ferme s’est aussi vu remettre plusieurs plaques de distinction du CAB, dont celle pour la meilleure production de gras et de protéine du troupeau (totalisant 848 kg) et pour la meilleure production de gras et protéine d’une vache (totalisant 1 292 kg) en 2018.

Selon Caroline, une bonne régie et la collaboration avec les intervenants qui la conseillent sont primordiales.

DES CHANGEMENTS S’IMPOSENT

Devenue mère de deux garçons de 9 et 7 ans, Jean-Félix et Gabriel, Caroline savait que la conciliation entre travail et famille deviendrait un défi lors des rentrées scolaires et des devoirs. Ses journées se terminaient souvent après 19 h 30 et elle savait que le temps viendrait à lui manquer. De plus, le confort des vaches devait être amélioré puisque celles-ci étaient dans des stalles de 8 pieds pour 2 vaches. Caroline a donc commencé à réfléchir à un projet susceptible de lui permettre à la fois de gagner du temps et d’augmenter le confort de ses vaches.

C’est dans ce contexte qu’elle et son père ont amorcé en 2013 une discussion relativement à la construction d’une étable robotisée. Ils ont visité plusieurs fermes pour explorer les possibilités et maximiser leur projet. Après mûres réflexions, Caroline a convaincu son père, fait l’achat d’un robot, vu et revu les plans de l’étable pour adapter cette dernière au troupeau et aux propriétaires, et finalement enclenché la construction. La première pelletée de terre a eu lieu en 2014. Caroline a même obtenu le feu vert de son père pour obtenir des soumissions quant aux matériaux; elle a donc choisi les fournisseurs des équipements de l’étable comme les stalles, la ventilation, l’électricité ou les équipements de fumier et de tension parasite.

Les vaches ont pu s’acclimater à la nouvelle étable un mois avant l’arrivée du robot. Elles allaient manger et coucher dans l’étable; elles ont pu s’habituer aux installations graduellement, ce qui a facilité la transition vers la traite robotisée qui s’est somme toute bien passée. L’entreprise a effectué plusieurs investissements au cours des années suivantes en vue de faciliter le travail et d’augmenter les performances du troupeau : RTM en 2004 et remplacement du mélangeur RTM existant en 2017 pour un plus gros, silo hermétique 20 x 100 pour avoir de l’ensilage fermenté à l’année et assurer la performance du troupeau, silo de maïs humide, rénovation de la laiterie, adaptation de la ventilation dans la vieille étable.

Lorsque les vaches étaient attachées, la production était de 31 ou 32 kg/vache, soit 1,10 kg de gras. L’objectif en passant à la traite robotisée était d’atteindre environ 38 kg/vache, ce qui a été atteint avec satisfaction moins de 2 ans plus tard. Caroline soulignait qu’il est impressionnant à quel point une bonne régie de l’alimentation et une surveillance du robot donnent de bons résultats. Le premier robot étant à pleine capacité et les performances limitées, un deuxième robot a fait son entrée en 2018. Cet investissement a été payant tant sur le plan de la qualité de vie qu’au niveau de la performance.

Depuis juin dernier, la ferme a atteint 42 kg/vache. Son objectif est de maintenir ce résultat à l’année tout en gardant de bonnes composantes. Elle mise sur le nombre de kg de gras par vache et a pour objectif de le maintenir à 1,6 kg annuellement. Pour Caroline, les investissements sont calculés; ils sont très importants, mais les rendements le sont tout autant. Il doit y avoir un retour sur chaque investissement. Elle vise à produire 100 kg de quota dans les installations actuelles.

En 2008, grâce à sa subvention, Caroline a décidé de bâtir une étable froide pour les taures de 6 à 23 mois dans l’optique de laisser plus de stalles aux vaches alors attachées, ce qui a permis l’achat de quota qui a ensuite servi à son projet d’étable robotisée.

Bénéficiant d’une subvention provinciale pour le bien-être animal, les propriétaires ont par ailleurs décidé de maximiser le confort et de diminuer le stress des vaches taries et en préparation au vêlage. Ils ont donc concassé le béton dans la vielle étable et installé une raclette, des logettes comme dans l’étable à robot ainsi que des carcans. Maintenant, toutes les vaches sont en stabulation libre.

LA GÉNÉTIQUE POUR LES PERFORMANCES

Un aspect de la régie important est de garder les vaches le plus longtemps possible dans l’étable. L’âge moyen du troupeau est présentement de 45 mois. Avec l’appui de sa vétérinaire, Caroline essaie de trouver le bon équilibre entre l’arrivée de la relève et les vaches déjà en place qui sont payantes. De plus, elle essaie de faire saillir les taures vers 13 plutôt que 15 mois afin d’aller chercher le maximum de la production laitière chez son élevage.

Afin de favoriser la sélection génétique dans son troupeau, Caroline utilise la semence sexée pour les taures et les bonnes vaches à la première saillie. Elle récolte aussi des embryons de ses meilleures lignées de vaches pour les implanter à la ferme dans des receveuses.

Les vaches performent en atteignant un pic à la lactation de 56 kg de lait et ses premiers veaux sont à 44 kg de lait au pic. Son taux de gestation est de 41 % et son taux de conception est de 62 %. Son nombre de jours intervalle vêlage-vêlage est de 384 jours. Les CCS se situent à 145 000 et les vaches donnent 1,57 kg de gras par jour comparativement à 1,18 en 2014.

UNE RÉPARTITION DES TÂCHES ÉQUILIBRÉE

Caroline est devenue l’unique propriétaire de l’entreprise en mars 2019. Elle se plaît à dire que son père est son plus fidèle employé. Ce dernier contribue à la régie et à l’alimentation; il aime voir l’ensemble des résultats à l’ordinateur. Il s’occupe des choix de cultures avec l’agronome, mais lui et Caroline ont une très bonne communication de sorte que celle-ci soit au courant des plantations qui sont effectuées dans les champs et connaisse les divers volets de l’entreprise. Avec environ 300 acres de terre, l’entreprise cultive 120 acres de foin, 90 de maïs et d’ensilage de maïs, 55 acres de blé, 20 acres de soya et une quinzaine d’acres en pâturage.

Aux champs, Caroline s’occupe de la préparation du terrain, de l’application du fumier ainsi que de la récolte des fourrages, ces tâches lui permettant d’être à l’extérieur de la ferme. Elle est aussi en charge de la vaccination, du choix des taureaux, des soins vétérinaires, de la compilation et de l’évaluation des données de l’entreprise en ce qui a trait aux animaux, ainsi que de la comptabilité.

Ayant du plaisir dans ce qu’il fait et encore nombre d’années devant lui en agriculture, le père de Caroline a été contaminé par la motivation de sa fille. Il partage avec elle ses connaissances et son expérience; Caroline est bien consciente qu’elles valent de l’or! Pour le père comme pour sa fille, le travail n’est pas une corvée mais un plaisir et on constate vite le respect et la complicité qui règnent entre eux. Il ne faut pas oublier la contribution de la mère de Caroline, qui veille sur les enfants quand cette dernière est occupée à la ferme et qui est d’une grande aide pour la jeune maman.

Pour avoir travaillé à la ferme avec son propre père jusqu’en 2001, soit pendant plus de 20 ans, le père de Caroline est habitué de vivre dans une ambiance de travail familiale. L’opinion de chacun est considérée. Il y a parfois quelques faux pas, mais c’est le meilleur moyen d’apprendre et de se relever! Pour sa part, Caroline n’hésite pas à demander de l’aide au besoin. Heureusement, elle est bien entourée, pouvant compter sur son père, son conjoint Sébastien Francœur, Alyson, une employée permanente, et Zachary, un jeune étudiant engagé pour l’été.

LE BIEN-ÊTRE, AUSSI IMPORTANT QUE LA SÉCURITÉ !

Pour Caroline, confort est synonyme de rendement laitier. Avec les parcs de vêlage, les stalles adaptées, les matelas et la paille, elle s’assure de donner le maximum à son troupeau. Dans un avenir très rapproché, elle prévoit l’achat d’une louve et d’une autre brosse pour les vaches, une amélioration de la ventilation en été grâce à l’installation de ventilateurs au-dessus des vaches, ainsi que le changement des colliers des vaches. Elle a soumis son dossier au PIFL (Programme d’investissement pour fermes laitières); celui-ci a été accepté et est présentement en analyse. Pour Caroline, ces investissements viendront améliorer son étable, déjà très fonctionnelle selon elle. Elle augmenterait le nombre de passages d’homme pour rentabiliser ses pas et la superficie derrière son robot si c’était à refaire, mais sinon elle n’y changerait rien.

Dans le cadre du programme ProAction, plusieurs affiches ont été installées pour favoriser la biosécurité. La sécurité à la ferme est importante pour Caroline; elle protège les enfants, qui sont toujours à proximité des installations, et permet aux employés de s’y retrouver et de prévenir les erreurs. Tout le monde est appelé à collaborer pour que les accidents soient évités le plus possible. Caroline a d’ailleurs installé un harnais de sécurité pour monter dans les silos et chacun doit l’utiliser s’il doit y monter. La sécurité avant tout!

ENCORE DES PROJETS

Caroline est en réflexion à savoir si elle augmente la taille de sa ferme dans la perspective où ses garçons voudraient s’y joindre et incarner la génération future, ou si elle conserve le statu quo et mise sur la performance. La décision n’est pas encore prise bien qu’un de ses garçons semble avoir un intérêt très marqué pour la ferme et les tracteurs !

À court terme, pour permettre à son père de faire moins d’heures tout en restant avec eux, Caroline aimerait surtout se consacrer à l’intégration de son conjoint dans la ferme. Celui-ci, Sébastien Francœur, travaille à l’extérieur comme opérateur de machinerie lourde mais détient aussi un DEP en production laitière. Ce domaine ne lui est vraiment pas inconnu et présente pour lui un grand intérêt. Sébastien est impliqué depuis plusieurs années à la ferme et a même participé à la construction de la nouvelle étable. Caroline et lui partagent leur vie depuis déjà plus de 15 ans, et il arrive que Sébastien amène une vision différente lors des discussions entre Caroline et son père, ce qui s’avère parfois très bénéfique.

Durant les années où Caroline compte investir presque la totalité de son temps à la ferme, elle prévoit se retirer un peu des clubs et regroupements. Par contre, elle aimerait bien par la suite se réinvestir auprès de l’UPA et des syndicats. Elle apprécierait faire découvrir l’agriculture aux jeunes et au monde extérieur.

Caroline est très fière de ne pas avoir lâché et d’avoir eu l’audace de reprendre la ferme familiale et d’être une femme agricultrice. Elle a su démontrer qu’elle était à sa place et que la détermination porte fruit! Au fond d’elle-même, elle espère être un modèle pour les autres femmes du milieu agricole et la relève en général.

Lactech est fière d'appuyer Caroline dans ses projets et convaincue que ceux-ci seront de francs succès!

 

GENEVIÈVE GAUTHIER, T.P.
Superviseure régionale
aux ventes laitières
Lactech inc

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5 commentaire(s)
Jacques Cantin2019-10-03 20:46:00
C'est tellement formidable de voir toute cette histoire! Bravo à vous deux et aussi à la mère de Caroline qui, sans aucun doute, contribue tout autant à la réussite. Encore bravo!!
Gérard Martin2019-10-03 10:04:46
Quel beau témoignage d'une relève agricole bien préparée et bien assumée au quotidien. Bravo à Daniel qui a su assurer la continuité du travail accompli par son père, Roger, et qui, à son tour, avec son support, a permis à Caroline de donner un autre élan à cette fière entreprise agricole bonconseilloise. La meilleure des chances à Caroline et longue vie à la Ferme Gerluda.
Karine Spenard2019-10-02 12:39:34
Bravo Caroline! Je suis très heureuse de lire cet article, tu m’impressionnes. Garde ta persévérance et bonne continuité!
Michel Benoit2019-09-30 13:45:57
Très intéressant comme lecture avec beaucoup de détails, félicitation et bonne continuité à toi Caroline.
Jocelyn jutras2019-09-30 09:16:19
Très intéressant de voir l’évolution d’une ferme laitière, la complicité et la détermination de deux générations pour en venir à cette belle réussite. Félicitations pour cette belle leçon de vie et bonne continuation.
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