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Entrevue avec Louis-François Marcotte

Divers •

À la suite de sa présence aux journées d’information Agri-Marché/Lactech de décembre 2018, Louis-François a bien voulu nous partager davantage au sujet de son parcours professionnel et de son cheminement entre son métier de cuisinier et sa grande implication dans le monde des affaires. Sur ce, bonne lecture!


COMMENT FAITES-VOUS POUR CONCILIER VOTRE VIE DE FAMILLE ET VOTRE TRAVAIL?

En fait, je dirais que c’est un jeu d’équilibre qui est perpétuel, dans le sens où j’ai le luxe de travailler dans un milieu le fun. La restauration et les médias sont les deux plus beaux milieux, mais ils sont aussi dangereux parce qu’il n’y a pas de fin au plaisir dans ce que l’on fait. Dans la restauration, plus particulièrement, il y a un mythe qui dit que nous travaillons seulement lorsque les gens sont en congé ou en période festive. Il y a un côté où cela est vrai, mais le luxe que j’ai depuis quelques années est de travailler avec La Cage et le Groupe Sportscene et ça me permet de travailler dans la restauration à temps plein sans avoir à capitaliser sur mes soirs et fins de semaines. Donc pour moi, c’est un avantage énorme. À l’âge où sont mes enfants, présentement 3, 8 et 17 ans, ça me permet d’être plus présent. Oui, je dois partir quelquefois, mais c’est un travail d’équipe; ma conjointe est là aussi pour pallier aux horaires avec moi. L’autre avantage que j’ai est que nous venons de déménager il y a quelques mois sur la Rive-Sud, donc moins loin du bureau. Nous voulions avoir un chalet à temps plein et c’est un petit peu ça que nous avons fait. Nous sommes à la campagne à tous les jours. Nous n’avons plus à faire des allers-retours entre le chalet et la maison, avec toutes les préparations reliées aux déplacements. Je sauve maintenant entre quatre et cinq heures de déplacements par semaine depuis que nous sommes déménagés. C’est aussi un jeu d’équilibre. Je le répète souvent, mais en bout de ligne, ça marche!


EST-CE QUE VOUS AVEZ EU UN LIEN AVEC LE MILIEU AGRICOLE LORSQUE VOUS ÉTIEZ PLUS JEUNE?

Non, mais j’aurais bien aimé ça! Je dis toujours à la blague que je n’aurais pas dû naître à Montréal mais en campagne. Pour moi, la campagne et l’agriculture sont de loin plus confortables que la ville.


EST-CE QUE VOTRE PÈRE VOUS A TRANSMIS DES VALEURS EN LIEN AVEC VOTRE MÉTIER?

Mon père travaillait dans un milieu complètement autre; il était dans le secteur de la finance. Mais il ne m’a jamais empêché de faire ce que j’avais envie de faire, il a toujours été derrière moi. J’ai eu des parents assez présents, mais qui ont respecté ma non-conformité. Ils ne m’ont jamais mis des freins dans mes projets. Dans ma première entreprise, il fallait vraiment que mon père croie en moi et en mon projet, puisque ça aurait pu dérouter assez facilement. J’ai eu le privilège d’être bien entouré et soutenu.


QUEL A ÉTÉ LE PLUS GRAND OBSTACLE QUE VOUS AVEZ RENCONTRÉ DANS VOTRE CARRIÈRE ET COMMENT L’AVEZ-VOUS SURMONTÉ?

En fait, je suis devenu épileptique quand j’avais 17 ans. Donc l’épilepsie est devenue, au fil des années, un vecteur positif dans le sens où ça m’a forcé à avoir une qualité de vie et de saines habitudes de vie; donc pour moi, cela a été de bons côtés. Je pense que quand tu as un diagnostic d’une maladie que tu vas avoir pour la vie, ça t’amène à voir les choses différemment et à faire attention à toi. Quand tu es jeune, tu te sens immunisé, tu roules tes affaires, tu fais la fête, tu te lèves tôt… J’ai dû prendre conscience de certains enjeux un peu plus jeune que les autres et j’ai dû me construire un équilibre un peu plus rapidement.


QUELLE IMPORTANCE ACCORDEZ-VOUS AUX PRODUITS LOCAUX ET COMMENT LES INTÉGREZ-VOUS DANS VOS RECETTES?

En fait, La Cage est un bon exemple. Quand j’ai commencé, il y a quatre ans et demi, tout était à refaire alors le défi était énorme. Un des premiers points importants pour moi était de réintégrer les produits locaux. C’était un gage de qualité que je pouvais faire rapidement et avec un minimum d’impact. Quand on parle d’approvisionnement et que nous changeons des produits, ça nous permet de travailler rapidement sans avoir à changer les habitudes en cuisine. Pour moi, cela a été une des premières étapes et c’est resté un des attributs majeurs pour nous, puisqu’une des lignes que nous avons est très locale; on y tient et on ne la lâche pas. Nous voulons que nos équipes travaillent dans le sens de cet objectif-là. Il est certain que ce n’est pas toujours parfait, mais il y a tellement de possibilités que nous pouvons faire avec les produits locaux. Il est certain que des fois, nous devons aller prendre des aliments un peu plus loin, par exemple dans les Maritimes, mais nous essayons de rester le plus proche possible.


DANS LE BUT DE CONTINUER VOTRE APPROVISIONNEMENT LOCAL, EST-CE QUE VOUS EFFECTUEZ DES VISITES DE FERMES OU DE VIGNOBLES?

Oui. Par exemple, nous prenons toutes nos patates auprès d’une ferme sur l’île d’Orléans; tout notre lot de patates vient de cette ferme. Quant aux tomates, pour moi, c’est un produit important. Le plus beau moment de l’année est quand nous pouvons rentrer des tomates de champ pour l’été, un super produit! Mais lorsque la saison est terminée et qu’il faut s’approvisionner à l’extérieur du pays, tu n’as plus la même constance dans les produits. C’est pourquoi nous nous sommes tournés vers les tomates de serre. Nous avons ces tomates à l’année, donc nous avons une tomate qui est faite ici, qui est contrôlée, qui est belle, avec laquelle nous pouvons bien travailler en cuisine. Avec 45 restaurants, il est important de pouvoir assurer une constance. Il y a un enjeu de prix, mais il y aussi un enjeu d’approvisionnement. Ce n’est pas toujours simple.


COMMENT PERCEVEZ-VOUS LES ENJEUX DE L’AGRICULTURE FACE AUX ALIMENTS? LES AJOUTS DE VITAMINES, SANS ANTIBIOTIQUES, ETC.

Notre travail se fait naturellement, puisque les agriculteurs fabriquent des produits plus nichés, sous leur nom. Ils font donc beaucoup plus attention à ce qu’ils mettent dans leur produit et comment ils le cultivent, contrairement à ce que nous pouvons voir dans la production de masse. Les consommateurs posent beaucoup plus de questions maintenant et sont intéressés à savoir ce qu’il y a dans leur assiette, d’où proviennent les aliments, donc nous nous devons de faire attention. Il faut être transparent au maximum. Rien ne peut être caché et ça fait une grosse différence.


EST-CE QUE VOUS ENTRETENEZ DES LIENS AVEC LA COMMUNAUTÉ AGRICOLE?

Eh bien moi, je deviens ami facilement alors j’ai tissé des liens au fil des années! (rires) J’essaie aussi d’entretenir les liens que j’ai construits. D’autre part, le Québec est assez petit alors je rencontre des gens partout et tout le monde se connaît dans le milieu. Ça va vite alors il n’est pas long que tu te crées des contacts.


COMMENT VOYEZ-VOUS L’ÉVOLUTION DE L’ALIMENTATION DES QUÉBÉCOIS DANS LES CINQ PROCHAINES ANNÉES?

Il faut être super aiguisés et s’adapter à l’évolution des consommateurs. Cela change beaucoup de choses. Il faut être à l’avant-garde et apprendre à gérer ces demandes-là. Nous avons lancé, dernièrement, l’option des galettes végé à La Cage.


QU’EST-CE QUI VOUS A MENÉ VERS LE MÉTIER DE CUISINIER?

Je ne dirais pas qu’être cuisinier était un accident de parcours, mais j’avais commencé mes études en génie mécanique au cégep. J’ai toujours été un gars très manuel qui aime et qui a besoin d’être dehors. Au fil du temps, j’ai fini mon cours, mais je me suis rendu compte que j’aimais faire de la soudure mais je n’aimais pas faire de la programmation. Étant plus jeune, je travaillais toujours dans le domaine de l’alimentation dans mes emplois. À 14 ans, je travaillais dans une petite boucherie à Dorval et je me suis dit que j’allais essayer le cours de boucherie. C’était un DEP mais à cette époque-là, ce genre de cours n’était pas trop à la mode. Je me suis dit que de l’expérience dans une cuisine, ça ne serait jamais perdu, alors mes parents m’ont appuyé. Finalement, cela a donné un bon résultat je crois! Ça a bien fini!


EST-CE QUE VOUS PRÉFÉREZ LE MONDE DES AFFAIRES OU ÊTRE DANS LE FEU DE L’ACTION DANS LES CUISINES?

Ma carrière a fait en sorte que je suis devenu entrepreneur, donc c’est certain que j’ai eu à développer ce côté-là, que j’aime beaucoup d’ailleurs. C’est certain que le côté chef va toujours être en moi; je ne pourrai jamais sortir ce côté-là de moi mais le côté entrepreneur fait beaucoup plus partie de ma vie maintenant.


VOUS AVEZ ACQUIS UNE CABANE À SUCRE, SOIT LA TABLÉE DES PIONNIERS; QU’EST-CE QUI VOUS A INTÉRESSÉ DANS LE MONDE ACÉRICOLE?

En fait, j’avais déjà une petite érablière où était mon chalet. J’apprenais, je m’amusais. Je n’étais pas encore à La Cage alors mes hivers étaient moins occupés. Je suis le genre de gars qui a besoin d’avoir beaucoup de projets en avant, d’être toujours occupé. Je faisais mes tournages et j’arrivais au mois de janvier un peu plus tranquille, et ce projet-là est passé. Nous sommes rendus à plus de 19 000 clients qui passent en douze fins de semaines. Alors cela me tient très occupé et j’aime vraiment ça!

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